Le terme de Dandy lui irait peut-être comme un gant. Il y en a bien qui ont dû dire ça. Ca lui va, mais plutôt comme le gant d’un autre, enfilé comme boutade, comme en témoignerait le sourire de démineur, qui intervient chaque fois que le sérieux prendrait trop de place. Et parce qu’ici l’élégance est moins affaire de textile que de rythme, un rythme toujours légèrement décalé.
Il fait semblant d’être immobile. Qu’on tourne le regard et il n’est déjà plus à la place où on l’attend, où il semblait attendre. Il bouge à contretemps, du moins si l’on prend comme repère le temps collectif, le temps convenu.
Il arrive aussi qu’il bouge sans musique. Comme s’il tirait à lui une musique contenue dans l’air environnant qu’il serait, temporairement, le seul à entendre. Il est à ce moment son propre instrument, celui d’une musique en creux. Musique et mouvement sont sa poule et son œuf, à moins que ce ne soit l’inverse.
Et quand finalement il restitue en images déroutantes le précipité d’instants accumulés, c’est d’une voix en dedans. Des mots résonnant sourd mais résolument tournés vers le dehors, tirés par la musique à moins que la musique ne soit soutenue par les mots. Autre œuf, autre poule.
Parfois Il répète la même phrase, plusieurs fois. comme pour vérifier de ce qu’il vient de dire la mélodie plus que le sens.
Les étiquettes qu’on lui colle, sûrement qu’il sait à l’avance qu’elle ne tiendront pas, ou ne tiendront sur lui que par un coin, que pour quelques instants. Comme le futur noyé qui sait l’absurdité de se débattre au milieu des requins, il se contente de glisser le long de l’inexorable, dedans jusqu’au cou et pourtant parfaitement sec. C’est ça qui fait dandy, peut-être, ça qui fait élégance.
Dedans et dehors la distance, aussi apparente que la poutre du même nom, pourrait être une marque de la comédie, de l’emprunt, du jeu. L’allusif des textes pourrait plaider dans ce sens, s’il n’était cette impression, irréductible, de prise directe avec ce que nos vies ont de plus capital.
Voir aussi : il était cinq heure dix, de Pauline Jardel